Fratelli Tutti : Encyclique du pape François ; Le Bon samaritain ( chapitre2)
‘‘Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et il tomba au milieu de brigands qui, après l’avoir dépouillé et roué de coups, s’en allèrent, le laissant à demi mort. Un prêtre vint à descendre par ce chemin-là ; il le vit et passa outre. Pareillement un lévite, survenant en ce lieu, le vit et passa outre. Mais un Samaritain, qui était en voyage, arriva près de lui, le vit et fut pris de pitié. Il s’approcha, banda ses plaies, y versant de l’huile et du vin, puis le chargea sur sa propre monture, le mena à l’hôtellerie et prit soin de lui. Le lendemain, il tira deux deniers et les donna à l’hôtelier, en disant : Prends soin de lui, et ce que tu auras dépensé en plus, je te le rembourserai, moi, à mon retour. Lequel de ces trois, à ton avis, s’est montré le prochain de l’homme tombé aux mains des brigands ?’’ Il dit : ‘‘Celui-là qui a exercé la miséricorde envers lui.’’ Et Jésus lui dit : ‘‘Va, et toi aussi, fais de même.’’ (Lc 10,
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L’arrière-plan
57. Cette parabole illustre un arrière-plan de plusieurs siècles. Caïn tue son frère Abel, « Où est ton frère ? » (Gn 4, 9).
59. Dans les traditions juives, le commandement d’aimer et de prendre soin de l’autre semblait se limiter aux relations entre les membres d’une même nation. Le précepte ancien « tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Lv 19, 18) était généralement censé se rapporter à des concitoyens.
Cependant, surtout dans le judaïsme qui s’est développé hors de la terre d’Israël, les frontières se sont élargies. L’invitation à ne pas faire aux autres ce que tu ne veux pas qu’ils te fassent est apparue (cf. Tb 4, 15). Le sage Hillel (Ier siècle av. J.-C.) disait à ce sujet : « Voilà la loi et les prophètes ! Tout le reste n’est que commentaire ».
: « La pitié de l’homme est pour son prochain, mais la pitié du Seigneur est pour toute chair » (Si 18, 13).
60. Dans le Nouveau Testament, le précepte d’Hillel est exprimé positivement : « Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le vous-mêmes pour eux : voilà la Loi et les Prophètes » (Mt 7, 12). Cet appel est universel
61« Tu ne molesteras pas l’étranger ni ne l’opprimeras car vous-mêmes avez été étrangers dans le pays d’Egypte » (Ex 22, 20)…..
« Si un étranger réside avec vous dans votre pays, vous ne le molesterez pas. L’étranger qui réside avec vous sera pour vous comme un compatriote et tu l’aimeras comme toi-même, car vous avez été étrangers au pays d’Egypte » (Lv 19, 33-34).
Dans le Nouveau Testament, l’appel à l’amour fraternel retentit avec force :
« Car une seule formule contient toute la Loi en sa plénitude : Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Ga 5, 14).
« Celui qui aime son frère demeure dans la lumière et il n’y a en lui aucune occasion de chute. Mais celui qui hait son frère est dans les ténèbres » (1 Jn 2, 10-11).
« Nous savons, nous, que nous sommes passés de la mort à la vie, parce que nous aimons nos frères. Celui qui n’aime pas demeure dans la mort » (1 Jn 3, 14).
« Celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, ne saurait aimer le Dieu qu’il ne voit pas » (1 Jn 4, 20).
L’abandonné
63. un homme blessé, gisait sur le chemin,..
Plusieurs sont passés près de lui .. ils ne se sont pas arrêtés. C’étaient des personnes occupant des fonctions importantes dans la société, qui n’avaient pas dans leur cœur l’amour du bien commun. lls n’ont pas été capables de perdre quelques minutes pour assister le blessé ou du moins pour lui chercher de l’aide.
Quelqu’un d’autre s’est arrêté, lui a fait le don de la proximité, a personnellement pris soin de lui, a également payé de sa poche et s’est occupé de lui.
Surtout, il lui a donné quelque chose que, dans ce monde angoissé, nous thésaurisons tant : il lui a donné son temps. Il avait sûrement ses plans pour meubler cette journée selon ses besoins, ses engagements ou ses souhaits. Mais il a pu tout mettre de côté à la vue du blessé.
64. À qui t’identifies-tu ?
Cette question est crue, directe et capitale.
Parmi ces personnes à qui ressembles-tu ? Nous devons reconnaître la tentation, qui nous guette, de nous désintéresser des autres, surtout des plus faibles
Nous sommes analphabètes en ce qui concerne l’accompagnement, l’assistance et le soutien aux plus fragiles et aux plus faibles de nos sociétés développées. Nous sommes habitués à regarder ailleurs, à passer outre, à ignorer les situations jusqu’à ce qu’elles nous touchent directement.
65. nous ne voulons pas perdre notre temps à régler les problèmes d’autrui. Ce sont les symptômes d’une société qui est malade, parce qu’elle cherche à se construire en tournant le dos à la souffrance.
, le bon Samaritain a montré que « notre existence à tous est profondément liée à celle des autres : la vie n’est pas un temps qui s’écoule, mais un temps de rencontre ».
Nous avons été créés pour une plénitude qui n’est atteinte que dans l’amour. Vivre dans l’indifférence face à la douleur n’est pas une option possible ; nous ne pouvons laisser personne rester ‘‘en marge de la vie’’.
Une histoire qui se répète
69., tous nous sommes ou avons été comme ces personnages : nous avons tous quelque chose d’un homme blessé, quelque chose d’un brigand, quelque chose de ceux qui passent outre et quelque chose du bon Samaritain.
70.. Il n’y a plus de distinction entre l’habitant de Judée et l’habitant de Samarie, il n’est plus question ni de prêtre ni de marchand ; il y a simplement deux types de personnes : celles qui prennent en charge la douleur et celles qui passent outre ; celles qui se penchent en reconnaissant l’homme à terre et celles qui détournent le regard et accélèrent le pas.
c’est l’heure de vérité ! Allons-nous nous pencher pour toucher et soigner les blessures des autres ? Allons-nous nous pencher pour nous porter les uns les autres sur les épaules ?
72. Les brigands
laisserons-nous gisant à terre l’homme agressé pour courir chacun nous mettre à l’abri de la violence ou pour poursuivre les brigands ? L’homme blessé sera-t-il la justification de nos divisions irréconciliables, de nos indifférences cruelles, de nos affrontements internes ?
73. ceux qui passent outre.
Il existe de nombreuses façons de passer outre qui se complètent : l’une consiste à se replier sur soi-même, à se désintéresser des autres, à être indifférent.
Une autre est de ne regarder que dehors.
il y a un mépris envers les pauvres et envers leur culture, et un mode de vie caractérisé par le regard dirigé vers l’extérieur, comme si on tentait d’imposer de force un projet de société importé.
Ils se trouvent hors de l’horizon de leurs intérêts.
74. Chez ceux qui passent outre, il y a un détail que nous ne pouvons ignorer : il s’agissait de personnes religieuses. ..Une personne de foi peut ne pas être fidèle et pourtant elle peut se sentir proche de Dieu et penser avoir plus de dignité que les autres. Mais il existe des manières de vivre la foi qui favorisent l’ouverture du cœur aux frères ; et celle-ci sera la garantie d’une authentique ouverture à Dieu.
Le paradoxe, c’est que parfois ceux qui affirment ne pas croire peuvent accomplir la volonté de Dieu mieux que les croyants.
75. Les ‘‘brigands de la route’’ ont souvent comme alliés secrets ceux qui ‘‘passent outre en regardant de l’autre côté’’.
Le cercle est fermé entre ceux qui utilisent et trompent la société pour la dépouiller et ceux qui croient rester purs .. mais en même temps vivent de ce système et de ses ressources.
L’imposture du ‘‘tout va mal’’ a pour réponse ‘‘personne ne peut y remédier’’, ‘‘que puis-je faire ?’’. On alimente ainsi la désillusion et le désespoir, ce qui n’encourage pas un esprit de solidarité et de générosité.
Enfoncer un peuple dans le découragement, c’est boucler un cercle pervers parfait : c’est ainsi que procède la dictature invisible des vrais intérêts cachés qui s’emparent des ressources et de la capacité de juger et de penser.
76. l’homme blessé.
Parfois, nous nous sentons, comme lui, gravement blessés et gisant à terre au bord du chemin. Nous nous sentons aussi troublés par nos institutions désarmées et démunies, ou mises au service des intérêts d’une minorité, de l’intérieur et de l’extérieur
Recommencer
77.. Soyons de bons samaritains qui prennent sur eux-mêmes la douleur des échecs, au lieu d’accentuer les haines et les ressentiments.
Il suffirait juste d’être animé du désir spontané, pur et simple de vouloir constituer un peuple, … d’intégrer et de relever celui qui gît à terre ; même si bien des fois nous nous sentons débordés et condamnés à reproduire la logique des violents…quand d’autres continuent à penser à la politique ou à l’économie pour leurs jeux de pouvoir
78 Cherchons les autres et assumons la réalité qui est la nôtre sans peur ni de la souffrance ni de l’impuissance,
Les difficultés qui semblent énormes sont une opportunité pour grandir et non une excuse à une tristesse inerte qui favorise la soumission.
Ne le faisons pas seuls.. Le Samaritain a cherché un hôte qui pouvait prendre soin de cet homme ; nous aussi, nous sommes invités à nous mobiliser et à nous retrouver dans un ‘‘nous’’ qui soit plus fort que la somme de petites individualités.
79. Le Samaritain en voyage est parti sans attendre ni remerciements ni gratitude.
Le dévouement est un devoir
Nous sommes tous responsables du blessé qui est le peuple lui-même et tous les peuples de la terre.
80. Qui est mon prochain ?
Jésus ne nous invite pas à nous demander qui est proche de nous, mais à nous faire proches,
81. Ce qui est proposé, c’est d’être présent aux côtés de celui qui a besoin d’aide, sans se soucier de savoir s’il fait partie ou non du même cercle d’appartenance.
le Samaritain s’est fait proche du Juif blessé. Pour se faire proche et présent, il a franchi toutes les barrières culturelles et historiques.
Jésus nous exhorte à laisser de côté toutes les différences et, face à la souffrance, à devenir proche de toute personne.
Donc, je ne dis plus que j’ai des ‘‘prochains’’ que je dois aider, mais plutôt que je me sens appelé à devenir un prochain pour les autres.
82. Le problème, c’est que, Jésus le souligne intentionnellement, le blessé était un Juif – habitant de Judée
83 cette rencontre miséricordieuse entre un Samaritain et un Juif est une interpellation puissante afin que nous puissions élargir notre cercle pour donner à notre capacité d’aimer une dimension universelle capable de surmonter tous les préjugés, toutes les barrières historiques ou culturelles, tous les intérêts mesquins.
L’étranger
84.Dans un autre passage de l’Évangile, Jésus dit : « J’étais un étranger et vous m’avez accueilli » (Mt 25, 35).
. En entrant dans cette dynamique, il fait finalement l’expérience que les autres sont « sa propre chair » (Is 58, 7).
85. Pour les chrétiens, les paroles de Jésus ont encore une autre dimension transcendante. Elles impliquent qu’il faut reconnaître le Christ lui-même dans chaque frère abandonné ou exclu (cf. Mt 25, 40.45).
celui qui croit peut parvenir à reconnaître que Dieu aime chaque être humain d’un amour infini et qu’« il lui confère ainsi une dignité infinie » À cela s’ajoute le fait que nous croyons que le Christ a versé son sang pour tous et pour chacun,
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