Archive pour la catégorie 'Cesaire Aimé'

Aimé Césaire et Roger Caillois

25 décembre, 2018

Dans Le « Discours sur le colonialisme »  Aimé Césaire, n’est pas tendre  avec Roger Caillois

 Il écrit

 

J’allais oublier M. Roger Caillois . 
….qui vient d’éprouver une grande colère. …car l’ethnographie occidentale, depuis quelque temps, .. s’ingénie à mettre en doute la supériorité omni latérale de la civilisation occidentale sur les civilisations exotiques.

…Des « intellectuels européens » qui, « par une déception et une rancœur exceptionnellement aiguës », s’acharnent depuis une cinquantaine d’années « à renier les divers idéaux de leur culture » et qui, de ce fait, entretiennent, « notamment en Europe, un malaise tenace ».

 

La doctrine  de Mr Caillois  a le mérite d’être simple. 

la science

l’Occident a inventé la science.

Seul l’Occident sait penser ;

Aux limites du monde occidental commence le ténébreux royaume de la pensée primitive, laquelle, dominée par la notion de participation, incapable de logique, est le type même de la fausse pensée.

 

Là-dessus on sursaute. On objecte…

Peine perdue !

Il reste, bien sûr, quelques menus faits qui résistent.

 Savoir l’invention de l’arithmétique et de la géométrie par les Egyptiens.

Savoir la découverte de l’astronomie par les Assyriens.

Savoir la naissance de la chimie chez les Arabes.

 Savoir l’apparition du rationalisme ou sein de l’Islam à une époque où la pensée occidentale avait l’allure furieusement prélogique.

 

la morale 

Après avoir annexé la science, le voilà qui revendique la morale.

Pensez donc ! M. Caillois n’a jamais mangé personne ! M. Caillois n’a jamais songé à achever un infirme !….

Eh bien, la voilà, la supériorité de l’Occident : « Cette discipline de vie qui s’efforce d’obtenir que la personne humaine soit suffisamment respectée pour qu’on ne trouve pas normal de supprimer les vieillards et les infirmes. »

La conclusion s’impose face aux anthropophages, aux dépeceurs et autres comprachicos, l’Europe, l’Occident incarnent le respect de la dignité humaine.

 

 la religion 

Pressons : M. Caillois n’est pas encore au bout de son palmarès. Après la supériorité scientifique et la supériorité morale, la supériorité religieuse.

Ici, M. Caillois n’a garde de se laisser abuser par le vain prestige de l’Orient. L’Asie, mère des dieux peut-être. En tout cas, l’Europe, maîtresse des rites. Et voyez la merveille : d’un côté hors d’Europe, des cérémonies type vaudou avec tout ce qu’elles comportent « de mascarade burlesque, de frénésie collective, d’alcoolisme débraillé, d’exploitation grossière d’une naïve ferveur », et de l’autre – côté Europe -, ces valeurs authentiques que célébrait déjà Chateaubriand dans le Génie du Christianisme : « les dogmes et les mystères de la religion catholique, sa liturgie, le symbolisme de ses sculpteurs et la gloire du plain-chant ».

 

Enfin, ultime motif de satisfaction.

Gobineau disait : « Il n’est d’histoire que blanche ». M. Caillois, à son tour, constate : « Il n’est d’ethnographie que blanche ». C’est l’Occident qui fait l’ethnographie des autres, non les autres qui font l’ethnographie de l’Occident. 

 

Aimé Césaire (1913-2008)

28 novembre, 2018

 Césaire : Fondateur et représentant majeur du mouvement littéraire de la négritude

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Aimé Césaire est un homme complet

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Il est le « nègre » qui vous emmerde

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En 1935 il  passe l’été en Dalmatie chez un ami et commence à y écrire « le Cahier d’un retour au pays natal », qu’il achèvera en 1938.

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 En 1936 ll lit « l’Histoire de la civilisation africaine de Frobenius » avec beaucoup de bonheur

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En 1939 Aimé Césaire, agrégé de lettres, rentre en Martinique pour enseigner

 Frantz Fanon, et  Édouard Glissant  ont été ses  élèves e au lycée Schœlcher),

 en 1941 il fonde la revue tropique

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 En  1945 Aimé Césaire, est élu maire de Fort de France et devney député  .Il le restera jusqu’en en 1993

en 1950 il écrit son discours sur la colonisation .

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Ses poèmes

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Pour ceux qui n’ont rien inventé

 Mon cœur, préservez-moi de toute haine 

ne faites point de moi cet homme de haine pour qui je n’ai que haine
car pour me cantonner en cette unique race
vous savez pourtant mon amour tyrannique
vous savez que ce n’est point par haine des autres races
que je m’exige bêcheur de cette unique race
que ce que je veux
c’est pour la faim universelle
pour la soif universelle
la sommer libre enfin

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Aimé Césaire :Cahier d’un retour au pays natal

27 novembre, 2018

 Voici des citations de ce cahier  édité par « présence africaine » en 1956 ,citations que j’ai parfois amputées  pour mieux les comprendre 

C’est certes  une trahison !

J’en demande pardon

mais  cela m’aide à digérer

ces « cris » si puissants 

ces versets si denses et  si riches

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Les Antilles

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Au bout du petit matin

les Antilles …

qui enfin

les Antilles grêlées de petite vérole

dynamité  d’alcool

échouée dans la poussière de cette ville ..

 

les fleurs  de sang

une vieille ville.. menteusement souriante

cette ville plate  étalée  

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et une honte cette rue paille

ici il n’ya que des toits de paille

que l’embrun a brunis et que le vent épile …

 c’est là que la jeunesse du bourg se débauche

c’est là que surtout la mer déverse ses immondices …

et la plage ne suffit pas à la rage écumante de la mer

..une détresse  ,cette plage  elle aussi

 avec ses tas d’ordure pourrissant , ses croupes  furtives  qui se soulagent (p 37)

**

Les ancêtres et leurs esprits  

 Au bout du petit matin

au-delà de mon père , de ma mère ,la case gerçant d’ampoules

comme un pécher tourmenté de la cloque…

et le lit de planches d’où s’est levée ma race toute entière

ma race de ce lit de planches.. avec ses pattes  de caisses  de Kérosine ,comme s’il avait l’éléphantiasis

le lit et sa peau de cabri   (p 37)

.**

et vous fantômes

 montez bleu de chimie

d’une forêt de bêtes traquées

..de chairs pourries…

de lanières  découpées dans le beau sisal de peau d’homme

… et toi terre tendue

la terre où tout est libre et fraternel ,ma terre (p 40)

** 

Les Blancs

Au bout du petit matin

le vent de jadis qui s’élève

des fidélités trahies

du devoir incertain qui se dérobe et cet autre petit matin d’Europe..

..je dirais orage

je dirais fleuve

qui ne me comprendrait pas ne comprendrait pas davantage le rugissement du tigre( p40)

« Le tigre ne proclame pas sa tigritude… il bondit sur sa proie et la dévore ! » (Soyinka)

  **

Ce qui est à moi

c’est un homme seul

 emprisonné de blanc

un homme qui défie les cris

mort de la mort blanche

la mort qui expire  dans une blanche mare de silence

(le blanc  couleur de la mort , le silence radio ,les feuilles blanches )

**

La raison des nègres

voir « la critique de la raison nègre » par Achille Mbembe

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des mots ?

 ah oui des mots !

Raison je te sacre vent du soir..

…Parce que nous vous haïssons, vous et votre raison

nous vous réclamons

de la démence précoce

de la folie flambante  

la folie qui se souviens

la folie qui hurle

la folie qui voit

la folie qui se déchaine

et vous savez le reste

 que deux et deux  font cinq

que la foret miaule

que l’arbre tire des marrons du feu

et le ciel se lisse la barbe ….(p 47)

**

Des hommes de la nature

Bien plus que des écologistes

Qui et quels nous sommes ?

admirable question

a force de regarder les arbres ,je suis devenus un arbre   

…a force de penser au Congo

je suis devenu un Congo

bruissant de forêts et de fleurs

où le fouet claque comme un grand étendard

où l’eau fait

 Likouala-likouala

où l’éclair de la colère lance sa hache verdâtre..

 

alors il faut bien commencer

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Aimé Césaire : Cahier d’un retour au pays natal : Debout !

26 novembre, 2018

Dans la 2é partie de son cahier,après avoir parlé des Antilles et de ses ancêtres maltraités Césaire  réagit

Il est temps pour les « nègres » de se relever

de se mettre debout dans un monde où il été tant humilié

**

La révolution

il faut bien commencer

 commencer quoi ?

 La seule chose au monde qu’il vaille la peine de commencer

la fin du monde parbleu ! (  p 53)

**

Nous n’avons jamais été amazones du roi de Dahomey

ni prince de Ghana avec 800 chameaux

ni docteurs à Tombouctou

Askia étant le grand roi  ,

ni architectes de Djenne

ni Mahdis ni guerriers

**

Je veux avouer  que nous fûmes de tout temps

 d’assez piètres  laveurs de vaisselle ,

 des cireurs de chaussures sans envergure ..

Le seul indiscutable record que nous ayons battu est celui de l’endurance et de la chicotte ( p61)

 

Un soir dans un tramway  en face de moi ,un nègre …

un nègre hideux, un  nègre grognon ,un nègre mélancolique

un nègre affalé ,ses mains réunies en prière sur un bâton noueux ,

un nègre enseveli dans une vieille veste éliminée

un nègre comique et laid

et des femmes derrière moi ricanaient en le regardant

Il était comique et laid

comique et laid… pour sûr

j’arborai air un grand sourire  complice

 ma lâcheté retrouvée (p 63)

**

Allons debout !

O lumière amicale

o riche source de  la lumière

Ceux qui n’ont inventé ,ni  la poudre ni la boussole

ceux qui n’ont jamais su dompter la vapeur et l’électricité

ceux qui n’ont exploré ni les mers ,ni le ciel

mais sans qui  la terre ne serait pas terre….

silo où se préserve et murit ce que la terre a de plus terre

ma négritude n’est pas une pierre(p70)

 

L’Europe nous a pendant  des siécles  gavé de mensonges et gonflés de pestilences

car il n’est point vrai que l’œuvre de l’homme est finie

que nous avons rien à faire dans le monde

que nous parasitons le monde

et aucune race ne possède le monopole de la beauté de l’intelligence , de la force (p 82)

 

Elle est debout la négraille

la négraille assisse

inattendument  debout

debout dans la cale

debout dans les cabines

debout sur le pont

debout dans le vent

debout sous le soleil  

debout dans le sang

debout et libre

 

et la voici

plus inattendument debout

debout dans les cordages

debout à la barre

debout à la boussole

debout à la carte

debout sous les étoiles

 debout

 et libre

et le navire lustral s’avancer impavide sur les eaux écroulées(p 87)

 

Aimé Césaire : Qu’est-ce que la colonisation ?

25 novembre, 2018

C’est la grande question posée par Césaire dans la première  partie de son célèbre « discours sur le colonialisme » 

Ce discours écrit par Césaire pour une revue  a été prononcé par un acteur au festival d’Avignon

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La colonisation

Elle  n’est point : ni évangélisation, ni entreprise philanthropique,

ni volonté de reculer les frontières de l’ignorance, de la maladie, de la tyrannie,

 ni élargissement de Dieu, ni extension du Droit ;

mais  le geste décisif de l’aventurier et du pirate,

 de l’épicier en grand et de l’armateur,

du chercheur d’or et du marchand,

de l’appétit et de la force,

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Le grand responsable dans ce domaine est le pédantisme chrétien, pour avoir posé les équations malhonnêtes : christianisme = civilisation ; paganisme = sauvagerie, 

les  victimes en sont les Indiens, les Jaunes, les Nègres.

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Certes lorsque des civilisations différentes entrent   en contact les unes avec les autres

c’est un  bien ! 

marier des mondes différents

c’est excellent ! 

Une civilisation, quel que soit son génie intime, qui se replie  sur elle-même, s’étiole ;

L’échange est ici l’oxygène,

et la grande chance de l’Europe est d’avoir été un carrefour,

(Notre malchance  a été que notre colonisation n’ a pas eu lieu au bon moment)

 **

La colonisation  abrutit  le colonisateur, le dégrade,  réveille en lui des instincts enfouis, et la convoitise,

 Chaque fois qu’il y a au Viet-Nam une tête coupée et un œil crevé

et qu’en France on l’accepte,

Chaque fois qu’une fillette est violée

et qu’en France on l’accepte,

il y a en France une régression universelle qui s’opère,

 une gangrène qui s’installe,

un foyer d’infection qui s’étend

un  poison est instillé dans les veines de l’Europe,

et  progresse lentement , mais sûrement l’ensauvagement du continent.

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Hitler  et Renan

C’est ainsi qu’au bout du capitalisme, désireux de se survivre, il y a Hitler. mais avant lui  il y a eu Renan qui tout humaniste qu’il fut a quand même écrit .

« La nature a fait une race d’ouvriers, c’est la race chinoise, d’une dextérité de main merveilleuse sans presque aucun sentiment d’honneur ;

une race de travailleurs de la terre, c’est le nègre ; soyez pour lui bon et humain, et tout sera dans l’ordre ;

une race de maîtres et de soldats, c’est la race européenne.

Réduisez cette noble race à travailler dans l’ergastule comme des nègres et des Chinois, elle se révolte…. Que chacun fasse ce pour quoi il est fait, et tout ira bien. »

Une civilisation qui justifie la colonisation – donc la force – est déjà une civilisation malade, une civilisation moralement atteinte, qui, irrésistiblement, de conséquence en conséquence, de reniement en reniement, appelle son Hitler,

Qui furent les colons ?

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Aimé Césaire : Qui sont les colons ?

24 novembre, 2018

Voici ce qu’en dit aimé Césaire  dans la 2é parie de « son discours  sur le colonialisme »

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Des barbares   

Le colonel de Montagnac, un des conquérants de l’Algérie déclarait  
« Pour chasser les idées qui m’assiègent quelquefois, je fais couper des têtes, non pas des têtes d’artichauts, mais bien des têtes d’hommes. »

le comte d’Herisson a dit: 

« nous rapportons un plein barils d’oreilles récoltées, paire à paire, sur les prisonniers, amis ou ennemis. »

Le maréchal Bugeaud de systématiser tout cela dans une théorie audacieuse et de se revendiquer des grands ancêtres : 
« Il faut une grande invasion en Afrique qui ressemble à ce que faisaient les Francs, à ce que faisaient les Goths. »

…Tout cela  prouvent que la colonisation,  déshumanise l’homme même le plus civilisé ;

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Des criminels   .

la colonisation a détruit : les admirables civilisations indiennes et que ni Deterding, ni Royal Dutch, ni Standard Oil ne me consoleront jamais des Aztèques ni des lncas.

 

Des méprisants  

Entre colonisateur et colonisé, il n’y a de place que pour la corvée, l’intimidation, la pression, la police, l’impôt, le vol, le viol, les cultures obligatoires, le mépris, la méfiance, la morgue, la suffisance, la muflerie, des élites décérébrées, des masses avilies.

 Aucun contact humain, mais des rapports de domination et de soumission qui transforment l’homme colonisateur en pion, en adjudant, en garde-chiourme, en chicote

et l’homme indigène en instrument de production.

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Quel progrés ?

J’entends la tempête.

 On me parle de progrès, de « réalisations », de maladies guéries, de niveaux de vie élevés au-dessus d’eux-mêmes.

Moi, je parle de sociétés vidées d’elles-mêmes, de cultures piétinées, d’institutions minées, de terres confisquées, de religions assassinées, de magnificences artistiques anéanties,

On me lance à la tête des faits, des statistiques, des kilométrages de routes, de canaux, de chemins de fer.

Moi, je parle de milliers d’hommes sacrifiés au Congo-Océan.

.Je parle de millions d’hommes à qui on a inculqué savamment la peur, le complexe d’infériorité, le tremblement, l’agenouillement, le désespoir, le larbinisme.

 On m’en donne plein la vue de tonnage de coton ou de cacao exporté, d’hectares d’oliviers ou de vignes plantés.

Moi, je parle d’économies naturelles, d’économies harmonieuses et viables, d’économies à la mesure de l’homme indigène désorganisées,  de cultures vivrières détruites, de sous-alimentation installée, de développement agricole orienté selon le seul bénéfice des métropoles, de rafles de produits, de rafles de matières premières.

 . On me parle de tyrans locaux mis à la raison ; mais je constate qu’en général ils font très bon ménage avec les nouveaux et que, de ceux-ci aux anciens et vice- versa, il s’est établi, au détriment des peuples, un circuit de bons services et de complicité.

 **

les sociétés africaines .

C’étaient des sociétés communautaires,

 jamais de tous pour quelques-uns. 
C’étaient des sociétés pas seulement antécapitalistes, , mais aussi anticapitalistes. 
C’étaient des sociétés démocratiques, toujours. 
C’étaient des sociétés coopératives, des sociétés fraternelles. 

Aimé Césaire : Ennemi de l’Europe ?

23 novembre, 2018

Dans son célèbre discours sur la colonisation ,aimé Césaire se défend ..il n’est pas un ennemi de l’Europe…il veut seulement défendre sa race et ecrit :

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« On dit, il paraît que, dans certains milieux, l’on a feint de découvrir en moi un « ennemi de l’Europe » et un prophète du retour au passé anté - européen.

 Pour ma part, je cherche vainement où j’ai pu tenir de pareils discours ; où l’on m’a vu sous-estimer l’importance de l’Europe dans l’histoire de la pensée humaine ; où l’on m’a entendu prêcher un quelconque retour ; où l’on m’a vu prétendre qu’il pouvait y avoir retour.

 Le grand drame historique de l’Afrique  a moins été sa mise en contact trop tardive avec le reste du monde, que la manière dont ce contact a été opéré ;

C’est au moment où l’Europe est tombée entre les mains des financiers et des capitaines d’industrie les plus dénués de scrupules que l’Europe s’est « propagée » 

;Notre malchance a voulu que ce soit cette Europe-là que nous ayons rencontrée sur notre route.

 j’ai ajouté que l’Europe a fait fort bon ménage avec tous les féodaux indigènes qui acceptaient de servir ;  ourdi avec eux une vicieuse complicité ; rendu leur tyrannie plus effective et plus efficace, et que son action n’a tendu à rien de moins qu’à artificiellement prolonger la survie des passés locaux dans ce qu’ils avaient de plus pernicieux.

 Nul ne sait à quel stade de développement matériel eussent été ces mêmes pays sans l’intervention européenne ; que l’équipement technique, la réorganisation administrative, « l’européanisation », en un mot, de l’Afrique ou de l’Asie n’étaient – comme le prouve l’exemple japonais – aucunement liés à l’occupation européenne ;que l’européanisation des continents non européens pouvait se faire autrement que sous la botte de l’Europe ; que ce mouvement d’européanisation était en train ; qu’il a même été ralenti ; qu’en tout cas il a été faussé par la mainmise de l’Europe. 

À preuve qu’à l’heure actuelle, ce sont les indigènes d’Afrique ou d’Asie qui réclament des écoles et que c’est l’Europe colonisatrice qui en refuse ; que c’est l’homme africain qui demande des ports et des routes, que c’est l’Europe colonisatrice qui, à ce sujet, lésine ; que c’est le colonisé qui veut aller de l’avant, que c’est le colonisateur qui retient en arrière. » 

Aimé Césaire :Les fantasmes des européens

22 novembre, 2018

Dans cette partie de son « discours sur la colonisation , Aimé Césaire parle comme un homme profondément blessé en citant les auteurs européens qui ont si mal jugé les africains ,même des gens comme Psichari ou Renan 

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je sais que je dois avoir l’orgueil de mon sang. Lorsque un homme supérieur cesse de se croire supérieur, il cesse effectivement d’être supérieur… Lorsque une race supérieure cesse de se croire une race élue, elle cesse effectivement d’être une race élue. » (Psichari-).

 du Faguet : 

« Le Barbare est de même race, après tout, que le Romain et le Grec. C’est un cousin. Le Jaune, le Noir n’est pas du tout notre cousin. Ici, il y a une vraie différence, une vraie distance, et très grande, ethnologique. Après tout, la civilisation n’a jamais été faite jusqu’à présent que par des Blancs … L’Europe devenue jaune, il y aura certainement une régression, une nouvelle période d’obscurcissement et de confusion, c’est-à-dire un second Moyen-âge. » …(Faguet)

 . La race noire n’a encore donné, ne donnera jamais un Einstein, un Stravinsky, un Gershwin. »(Jules Romain)

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parmi ces auteurs A.M Gourou ..

Octave Mannonni  et « la psychologie de la colonisation

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ou B. P. Tempels, missionnaire et belge, qui écrit sur « la Philosophie bantoue »,  vaseuse et méphitique à souhait,

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 Que l’on pille, que l’on torture au Congo, que le colonisateur belge fasse main basse sur toute richesse, qu’il tue toute liberté, qu’il opprime toute fierté – qu’il aille en paix, le révérend Père Tempels y consent. Mais, attention !

 je dis : Vous allez au Congo, respectez la philosophie bantoue !

Quelle générosité, mon Père ! Et quel zèle !

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La « psychologie » de M. Mannoni est aussi « désintéressée », aussi « libre », que la géographie de M. Gourou ou la théologie missionnaire du R. P.Tempels !

et puis ….Roger Caillois !

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Au fait, le dossier est accablant. 
Mais laissons cela. 
Les moralistes n’y peuvent rien. 
La bourgeoisie, en tant que classe, est condamnée, qu’on le veuille ou non, à prendre en charge toute la barbarie de l’histoire,

les tortures du Moyen-Age comme l’inquisition,

la raison d’état comme le bellicisme,

 le racisme comme l’esclavagisme,

bref, tout ce contre quoi elle a protesté et en termes inoubliables,

du temps qu’elle incarnait le progrès humain

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Nos traditions

Encore une fois, je fais systématiquement l’apologie de nos vieilles civilisations nègres : c’étaient des civilisations courtoises.

 Des empires soudanais ? Des bronzes du Bénin ? De la sculpture Shongo ? Je veux bien ; ça nous changera de tant de sensationnels navets qui adornent tant de capitales européennes. De la musique africaine. Pourquoi pas ?

Et de ce qu’ont dit, de ce qu’ont vu les premiers explorateurs… Pas de ceux qui mangent aux râteliers des Compagnies ! Mais des d’Elbée, des Marchais, des Pigafetta ! Et puis de Frobénius ! Hein, vous savez qui c’est, Frobénius ? Et nous lisons ensemble :

« Civilisés jusqu’à la moelle des os ! L’idée du nègre barbare est une invention européenne. »

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 NB

Achille Mbembe va longuement allonger la liste de ces fantasmes  dans son livre

 « critique de la raison nègre » publié en 2013

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Aimé Césaire :Un coup de gueule !

21 novembre, 2018

Aime Césaire quand il écrivit « son discours sur la colonisation »  semble  assez calme

A le lire on pourrait croire qu’il fait un cours à des étudiants 

comme un professeur 

mais certainement pas comme  un tribun

et puis subitement

 il ne se retient plus

il éclate

il explose

il ne sait plus quel mot inventer pour dire son indignation

 

« Donc, camarade, te seront ennemis

- non seulement gouverneurs sadiques et préfets tortionnaires,

non seulement colons flagellants et banquiers goulus,

non seulement macrotteurs politiciens lèche-chèques et magistrats aux ordres,

 

mais pareillement et au même titre,

journalistes fielleux, académiciens goîtreux

endollardés de sottises, ethnographes métaphysiciens

et dogonneux, théologiens farfelus et belges, intellectuels jaspineux,

sortis tout puants de la cuisse de Nietzsche

ou chutés calenders-fils-de-Roi d’on ne sait quelle Pléiade,

 

les paternalistes, les embrasseurs, les corrupteurs, les donneurs de tapes dans le dos,

les amateurs d’exotisme, les diviseurs, les sociologues agrariens,

les endormeurs, les mystificateurs, les haveurs, les matagraboliseurs,

 

tous suppôts du capitalisme, tous tenants déclarés ou honteux du colonialisme pillard,

tous responsables, tous haïssables, tous négriers,

tous redevables désormais de l’agressivité révolutionnaire. »

 

 

Aimé Césaire :La colonisation et l’empire romain

20 novembre, 2018

Aimé Césaire  termine son « discours sur le colonisation » en constatant que L’entreprise coloniale est, au monde moderne, ce que l’impérialisme romain fut au monde antique : préparateur du Désastre et fourrier de la Catastrophe  

**

Eh Quoi ? 

Les Indiens massacrés, le monde musulman vidé de lui-même,

le monde chinois pendant un bon siècle souillé et dénaturé ;

le monde nègre disqualifié ;

d’immenses voix à tout jamais éteintes ;

vous croyez que tout cela ne se paie pas ?

 

Aimé Césaire  cite pour le prouver un texte de Edgar Quinet 

Texte de Quinet

 « Le système de la civilisation antique se composait d’un certain nombre de nationalités, de patries, qui, bien qu’elles semblassent ennemies, ou même qu’elles s’ignorassent, se protégeaient, se soutenaient, se gardaient l’une l’autre.

 Quand l’empire romain, en grandissant, entreprit de conquérir et de détruire ces corps de nations, les sophistes éblouis crurent voir, au bout de ce chemin, l’humanité triomphante dans Rome. On parla de l’unité de l’esprit humain ; ce ne fut qu’un rêve. Il se trouva que ces nationalités étaient autant de boulevards qui protégeaient Rome elle-même…

 Lors donc que Rome, dans cette prétendue marche triomphale vers la civilisation unique, eut détruit, l’une après l’autre, Carthage, l’Egypte, la Grèce, la Judée, la Perse, la Dacie, les Gaules, il arriva qu’elle avait dévoré elle-même les digues qui la protégeaient contre l’océan humain sous lequel elle devait périr.

 Le magnanime César, en écrasant les Gaules, ne fît qu’ouvrir la route aux Germains. …

Tant de sociétés, tant de langues éteintes, de cités, de droits, de foyers anéantis, firent le vide autour de Rome, et là où les barbares n’arrivaient pas, la barbarie naissait d’elle-même »

**

Et alors, je le demande : qu’a-t-elle fait d’autre, l’Europe bourgeoise ? Elle a sapé les civilisations, détruit les patries, ruiné les nationalités, extirpé « la racine de diversité ».

 Plus de digue. Plus de boulevard.

 L’heure est arrivée du Barbare.

Du Barbare moderne.

**

En sorte que, si l’Europe occidentale ne prend d’elle-même, en Afrique, en Océanie, à Madagascar, c’est-à-dire aux portes de l’Afrique du Sud,

aux Antilles, c’est-à-dire aux portes de l’Amérique,

l’initiative d’une politique des nationalités,

 l’initiative d’une politique nouvelle fondée sur le respect des peuples et des cultures ; que dis-je ?

Si l’Europe ne galvanise  pas les cultures moribondes ou ne suscite pas  des cultures nouvelles ; si elle ne se fait pas réveilleuse de patries et de civilisations,

l’Europe se sera enlevé à elle-même son ultime chance et, de ses propres mains, tiré sur elle-même le drap des mortelles ténèbres.

**

NB :l’Europe envahi

Césaire est il un prophète ?

Pouvez  t il imaginer  l’invasion de l’Europe depuis 2015  par des milliers de refugiés africains   

plus de digue

plus de boulevard

plus de frontière

l’Europe est envahi

inexorablement