Frantz Fanon : Les damnés de la terre et la violence
4 mai, 2019Contre les colons une seule solution : La violence
Les colonisés
p 41: « Les derniers seront les premiers. » La décolonisation est la vérification de cette phrase. C’est pourquoi, sur le plan de la description, toute décolonisation est une réussite.
Le monde colonisé est un monde coupé en deux. La ligne de partage, la frontière en est indiquée par les casernes et les postes de police.
p45. Les coutumes du colonisé, ses traditions, ses mythes, surtout ses mythes, sont la marque même de cette indigence, de cette dépravation constitutionnelle. C’est pourquoi il faut mettre sur le même plan le DDT qui détruit les parasites, vecteurs de maladie, et la religion chrétienne qui combat dans l’œuf les hérésies, les instincts, le mal. Le recul de la fièvre jaune et les progrès de l’évangélisation font partie du même bilan…… Je parle de la religion chrétienne, et personne n’a le droit de s’en étonner. L’Église aux colonies est une Église de Blancs, une église d’étrangers. Elle n’appelle pas l’homme colonisé dans la voie de Dieu mais bien dans la voie du Blanc, dans la voie du maître, dans la voie de l’oppresseur. Et comme on le sait, dans cette histoire il y a beaucoup d’appelés et peu d’élus.
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p 47 l’élite colonisée
la bourgeoisie colonialiste cherche avec fièvre des contacts avec les « élites ». C’est avec ces élites qu’est entrepris le fameux dialogue sur les valeurs. La bourgeoisie colonialiste, quand elle enregistre l’impossibilité pour elle de maintenir sa domination sur les pays coloniaux, décide de mener un combat d’arrière-garde sur le terrain de la culture, des valeurs, des techniques, etc. Or, ce qu’il ne faut jamais perdre de vue, c’est que l’immense majorité des peuples colonisés est imperméable à ces problèmes.
Pour le peuple colonisé la valeur la plus essentielle, parce que la plus concrète, c’est d’abord la terre : la terre qui doit assurer le pain et, bien sûr, la dignité. Mais cette dignité n’a rien à voir avec la dignité de la « personne humaine ». Cette personne humaine idéale, il n’en a jamais entendu parler. Ce que le colonisé a vu sur son sol, c’est qu’on pouvait impunément l’arrêter, le frapper, l’affamer
p 51 L’intellectuel se comporte objectivement, dans cette période, comme un vulgaire opportuniste
p 52. Le peuple, par contre, adopte dès le départ des positions globales. La terre et le pain : que faire pour avoir la terre et le pain ? Et cet aspect buté, apparemment limité, rétréci, du peuple, est en définitive le modèle opératoire le plus enrichissant et le plus efficace.
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Les danses du peuple
En attendant la vraie violence ,le peuple se défoule en dansant avec rage
p 58 C’est pourquoi une étude du monde colonial doit obligatoirement s’attacher à la compréhension du phénomène de la danse et de la possession.
Le cercle de la danse est un cercle permissif. Il protège et autorise.
À heures fixes, à dates fixes, hommes et femmes se retrouvent en un lieu donné et, sous l’œil grave de la tribu, se lancent dans une pantomime d’allure désordonnée mais en réalité très systématisée où, par des voies multiples, dénégations de la tête, courbure de la colonne, rejet en arrière de tout le corps, se déchiffre à livre ouvert l’effort grandiose d’une collectivité pour s’exorciser, s’affranchir, se dire. Tout est permis… dans le cercle.
…. Mises à mort symboliques, chevauchées figuratives, meurtres multiples imaginaires, il faut que tout cela sorte. Les mauvaises humeurs s’écoulent, bruyantes telles des coulées de lave.
Après des années d’irréalisme, après s’être vautré dans les phantasmes les plus étonnants, le colonisé, sa mitraillette au poing, affronte enfin les seules forces qui lui contestaient son être : celles du colonialisme. Et le jeune colonisé qui grandit dans une atmosphère de fer et de feu peut bien se moquer
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Les politiques
Eux ne veulent pas de violence !
Ils sont des privilégiés et veulent garder leurs avantages
Ils discutent !
p 61 les partis politiques et les élites intellectuelles ou commerciales. Or ce qui caractérise certaines formations politiques, c’est le fait qu’elles proclament des principes mais s’abstiennent de lancer des mots d’ordre
Les partis politiques nationalistes n’insistent jamais sur la nécessité de l’épreuve de force, parce que leur objectif n’est pas précisément le renversement radical du système. Pacifistes, légalistes, en fait partisans de l’ordre… nouveau, ces formations politiques posent crûment à la bourgeoisie colonialiste la question qui leur est essentielle : « Donnez-nous plus de pouvoir. »
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La violence ?
p 72 Nous l’avons vu, c’est l’intuition qu’ont les masses colonisées que leur libération doit se faire, et ne peut se faire que par la force
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