Archive pour la catégorie 'Le XVIIIés'

Correspondance entre Voltaire et Madame du Deffand sur la mort

1 juillet, 2010

Une correspondance suivie entre Voltaire et Madame Du Deffand montre à quel point Voltaire était hanté par la mort

En réponse à l’ennui chronique ,existentielle ressentie et exprimé par madame Du Deffand ,Voltaire écrit:

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« Quant à la mort …il est très certain qu’on ne la sent point; 

 Ce n’est pas un moment douloureux, elle ressemble au sommeil comme deux gouttes d’eau; 

 Ce n’est pas l’idée qu’on ne se réveillera plus qui fait de la peine , 

c’est l’appareil de la mort qui est horrible , 

c’est la barbarie de l’extrême onction 

C’est la cruauté de nous avertir que tout est fini pour nous (9 Mai 1764)

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Il est bien clair ..que nous serons après notre mort, ce que nous étions avant de naître, 

 mais pour les deux ou trois minutes de notre existence qu’en ferons nous ? 

..Nous sommes emportés dans le mouvement général imprimé par le maître de la nature. 

Le courage, la résignation aux lois de la nature, 

 le profond mépris pour toutes les superstitions, 

 l’exercice de la faculté de penser, sont des consolations véritables(22 mai 1764) 

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N’est ce pas rien que d’être guéri des malheureux préjugés 

 qui mettent à la chaîne la plupart des hommes…? 

de ne pas mettre son âme entre les mains d’un charlatan? 

de ne pas déshonorer son être par des terreurs et des superstitions indignes de tout être pensant? 

d’être dans une indépendance qui vous délivre de la nécessité d’être hypocrite? 

De n’avoir de cour à faire à personne, et d’ouvrir librement son âme à ses amis?(4 juin 1764) 

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dans une de ses dernières lettres à Voltaire, Madame  Du Deffand répond:

« M Voltaire, amant déclaré de la vérité, dites moi, de bonne foi, l’avez vous trouvée? 

 Vous combattez et détruisez toutes les erreurs; mais que mettez vous à leur place? 

 Tous discours sur certaine matière me paraissent inutiles; 

 le peuple ne les entend point, la jeunesse ne s’en soucie guère, 

 les gens d’esprit n’en n’ont pas besoin, et peut on se soucier d’éclairer les sots? 

Que chacun pense et vive à sa guise, et laissons chacun voir par ses lunettes(28/12/65)

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Des revues pieuses ont répandu des récits légendaires sur les derniers moments de Voltaire. Il serait mort dans des conditions terribles en  criant son angoisse

Ces récits sont évidemment faux ,mais on sait que de grands saints du dix septième siècle ont terriblement eu peur de la mort .Ne serais-ce que Sainte Jeanne de Chantal ; Rancé ou la  mère Angelique de Port Royal

Voltaire a regardé la mort avec beaucoup plus de sérénité

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Correspondance entre Voltaire et Fréderic de Prusse sur la religion

1 juillet, 2010

Pendant des années, Voltaire aborde le problème religieux

 dans sa correspondance avec Frédéric de Prusse

Selon Frédéric, Dieu est tout puissant; donc l’homme n’est pas libre

Selon Voltaire, Dieu ne peut nous tromper

Or il  nous a  donné  le  sentiment d’être libre.

Donc, nous le sommes

Il emploie le même argument quand il déclare que
la Bible et l’Eglise

 ne peuvent venir de Dieu

car
la Bible et l’église nous enseignent des erreurs

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Voltaire a donc vraiment recherché Dieu et réfléchi sur les grands mystères de la vie, de la souffrance et de la mort .

Il en parle avec ses amis

Avec madame du Deffand ou avec Fréderic de Prusse

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Il n’ a pas été que ce monstre qui a voulu détruire la religion .

Il a été noirci par ses adversaires à qui ,

il faut le reconnaître , il ne faisait pas de cadeau

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Et Puisque Dieu existe, puisque il est juste,

il faut nécessairement que l’âme soit immortelle.

On retrouve la foi en cette immortalité dans toutes les cultures,

chez les Egyptiens ,les Grecs ,les Hindous..

et Voltaire constate avec surprise  

« .Il n’y a que la petite peuplade des Hébreux à en douter » 

Mais oui !

Voltaire croyait en un au-delà

Et Oui !

Voltaire croyait en une autre vie

Eckartshausen (1752-1803) un alchimiste ou un théosophe ?

26 août, 2009

Un theosophe ? 

L’emploi  du mot théosophe préte parfois à confusion

Les théosophes sont des personnes qui cherchent à prendre contact avec les esprits en faisant tourner les tables ou avec d’autres méthodes comme les adeptes de
la Société théosophique de Helena  Blavatsky 

Mais les  théosophes, auparavant étaient  des « chercheurs de Dieu » ,qui découvraient Dieu dans les œuvres de la création tel Boehme

C’est dans ce dernier sens que l’on dit que Eckartshausen est un théosophe

Il écrivit « Dieu ,l’amour le plus  pur » qui fut en son temps un véritable best seller

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Eckartshausen  était  le fils naturel d’un comte de Bavière, et devint plus tard l’archiviste de l’électeur de Bavière

Cette fois ci, notre homme n’est pas un moine, comme Dom Pernety son contemporain, mais quand même, comme lui un « rat des bibliothèques »

Comme Pernety,qui fonde la secte des « illuminés d’Avignon », il conteste le siècle des lumières, et parle de la « communauté de la lumière » qui est composée de sages éparpillés dans le monde .Eux seuls, ont la véritable connaissance car  ils ont une profonde vie intérieure en communion avec Dieu  

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Un alchimiste ?   

Il fut considéré comme un alchimiste car il compose » le catéchisme de la chimie supérieure » en  1792

Il explique comment nous régénérer le corps et l’esprit, comment se réveiller, comment  remettre en mouvement des forces invisibles cachées en nous

Il donne7 moyens, (le même chiffre que pour les 7 sacrements) dans le but de faire pénétrer la lumière dans la matière

Il compose le Notre père et l’Ave de l’alchimiste

 

« force suprême de la lumière 

,toi qui est le divin dans la nature, 

et qui demeure au plus profond de celle ci comme dans le ciel , 

 que soit sanctifiés tes attributs et tes préceptes 

.Ou tu es, tout est parfait  

 Que le règne de ta connaissance arrive parmi les tiens …. 

donne nous de la rosée du ciel et du gras de la terre, 

 les fruits du soleil et de la lune venant de l’arbre de vie …. »

 (cahiers de l’hermétisme edt Dervy 1996)

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Voici un petit extrait de ses œuvres traduite en français par Gosvin de Stassart..

Qui m’a donc mis ici ? quelle puissance a donné cette admirable structure à mon corps ? qui m’a doué de la précieuse faculté de jouir de tout ce qui m’environne ? quel est l’être à qui je suis redevable de tous ces bienfaits ? — C’est celui qui a créé ces globes et ce firmament dont la magnificence nous étonne, c’est celui dont la constante sollicitude s’étend à tout ; mais, que sont les plaisirs d’une nature matérielle auprès des sentiments de l’âme, auprès de ces tendres émotions qu’il a placées dans mon cœur ?

Les plus agréables jouissances de la nature me paraîtraient bientôt insipides, si j’étais isolé sur la terre ; aussi la main bienfaisante du Créateur a-t-elle voulu me donner, pour compagnons, des êtres doués comme moi d’un cœur sensible, des êtres susceptibles de partager les plaisirs d’autrui. Tout ce qui m’entoure est animé. Chacune, de ces feuilles est couverte d’une foule d’insectes ; tous vivent, tous ressentent la bonté du suprême arbitre de toutes choses. Mille oiseaux charment à l’envi le bosquet par leur ramage enchanteur ; et, tandis que le redoutable lion exprime en rugissant le bonheur d’exister, ici roucoule une tourterelle ; là j’entends siffler la linotte ; plus loin sautille la fauvette ; elle fredonne un air joyeux et se réjouit de son existence. Je suis au milieu de tous ces êtres divers, je vois, je sens, je partage leurs plaisirs ; mais un sentiment intérieur, un pouvoir inconnu m’avertit que j’ai de la ressemblance avec celui qui m’a créé….

Qu’il est bon cet être infini qui m’a comblé de tant de biens ! quelle doit être son inépuisable bonté ! il est tout amour. Te ressembler, par l’amour, ô mon Dieu ! voilà ma vocation ; tout m’annonce que c’est ta loi suprême. Ma conscience m’en avertit : ce précepte est gravé dans mon cœur en caractères ineffaçables. Le désir de voir heureux tout ce qui m’entoure est le plus ardent de mes désirs. Tout est bonheur pour l’homme de bien. Ses peines mêmes, par les consolations qu’elles lui procurent de toutes parts, ne sont pas sans charmes, et si nous ne sommes point heureux par nous-mêmes, ne le devenons-nous pas en partageant le bonheur de nos semblables ? Le plus pur des sentiments que tu as excités dans notre âme, Seigneur, n’est-ce pas la faculté de prendre part au chagrin et à la joie des autres ? « Mes enfants, nous dis-tu, c’est à vous-mêmes que je confie le soin de votre bonheur. Étendez ces bras que je vous ai donnés pour vous secourir mutuellement ; goûtez le plaisir d’essuyer une larme sur l’œil de votre frère. »

Voilà tes discours que répète la nature entière : la faible vigne soutenue par l’ormeau, le lierre rampant qui, pour s’élever, s’unit à l’arbre vigoureux, les fleurs des jardins , les moindres plantes des champs nous parlent le même langage. Oui, ce n’est qu’en aimant, en aimant comme tu nous l’ordonnes, que je sens le prix de mon existence.

 

 

Antoine Joseph Pernety 1716-1796,alchimiste illuminé

26 août, 2009

Encore un moine !

Encore un jeune rêveur érudit

On l’imagine facilement  en train de farfouiller dans les manuscrits des mauristes qui travaillèrent à « Saint Germain des prés » à Paris 

Ce furent ces mauristes qui les premiers  firent imprimer les œuvres des pères de l’église

Mais ce ne sont pas ces pères de l’église qui intéressaient notre jeune bénédictin, à l’affût de mystères 

Il préférait scruter les chapiteaux étranges qui se trouvent encore dans le chœur de l’église de Saint Germain des prés 

Il publia en 1757 un « dictionnaire portatif de peinture ,de sculpture et de gravure »,puis s’intéresse aux « fables égyptiennes » et surtout publie  le « dictionnaire Mytho-Hermetique » assez ardu à lire   

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Rêveur, érudit, curieux, Dom Pernety fit le voyage avec Bougainvilliers en tant que aumônier de l’expédition.

A son retour , désormais épris de liberté et encore enivré par le vent du large , il quitte son ordre qui sentait le renfermé,

Mais pas question de se priver de livres. A sa grande joie, Frédéric 2 l’invite à Berlin pour devenir son  bibliothécaire.

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Toujours aussi rêveur et de plus en plus mystique, il s’emballe pour les idées de Swedenborg, auteur en particulier de « la sagesse angélique »

Pernety  institue un « rite hermétique »  pour entrer en relation avec les anges.

La reine de Prusse ayant participé à ces rites, Frédéric 2, homme des lumières,  fut accablé et préféra se séparer d’un tel illuminé 

Pernety ne se décourage pas et se rend à Avignon pour fonder une secte qu’il appelle lui-même « les illuminés d’Avignon »

Comment se fait il que même le baron de Staël 

faisait parti des illuminés d’Avignon  ?

Pernety avait il le don de la persuasion ?

On le dit charmant et charmeur

comme beaucoup de rêveurs !

Mais en plus ce qui le rendait peut être plus convainquant ,

il était savant.

C’est ainsi que si le 18é siècle fut le siècle de la lumière ,il fut aussi celui des illuminés  

Meslier qui osait penser autrement fut recupéré par Voltaire

26 décembre, 2008

Meslier

Comme Voltaire, Meslier a été sincère dans sa recherche ,mais cette recherche lui fut plus douloureuse car il était prêtre et ses conclusions l’ amenèrent à nier totalement l’existence de Dieu :

Jean Meslier était un curé obscur qui fut ,toute sa vie, un prêtre exemplaire .Il ne croyait plus en Dieu ,mais étant donné les préjuges de l’époque et la puissance de l’Eglise ,il ne pouvait et ne voulait le dire Le jour de sa mort en 1729 ,il laissa une lettre pour ses confrères signalant l’existence d’un « mémoire » ou il expliquait les raisons de son athéisme et de son silence

Jean Meslier a vécu le problème de la foi au plus profond de lui même, non comme une sorte de libertin enjoué qui rie et qui  se moque mais en homme  qui souffre et qui saigne, car vraiment il réalise qu’il a été piégé .Pris dans un filet , il ne peut plus se dégager .Sa recherche est  devenue une étude ,une réflexion permanente, menée parfois avec hargne, avec ironie , mais sans humour .Le sujet ,pour lui est trop grave 

Très vite Voltaire prend connaissance de ce mémoire ,.Il le corrige, l’élague ,le censure en fonction de ses propres convictions .Il se fait un malin plaisir d’en publier des extraits. Ce « mémoire  » pourrait très bien être à l’origine de l’intérêt de Voltaire pourla Bible et de sa hargne contre ‘l’infâme » .Ce n’est qu’après la découverte de Meslier que Voltaire se rend chez Dom Calmet pour étudier les textes saints, faire ses propres recherches et  publier   la « bible enfin expliquée »(1776)

La Franc Maconnerie :Origine

1 octobre, 2008

Les francs maçons, dit on ,sont des anticléricaux

et mangeaient par défi de la viande le vendredi

Les francs maçons dit on

sont les ennemis de la religion

et ont provoqué la révolution

 

En fait, la franc maçonnerie fut fondée en 1717

 deux siècles exactement après la révolte de Luther

par  Désagulier qui était pasteur 

Il avait été chassé de France

par la révocation de l’édit de Nantes

Las de l’intolérance et des guerres de religions

il décide de réunir dans une même loge à Londres

      des personnes de toutes conditions et de toutes religions 

        **          

Les constitutions de ce nouveau mouvement

rédigées par le pasteur Anderson

prône une grande tolérance

Il faut croire en Dieu ,

rechercher l’harmonie universelle

et  respecter les convictions personnelles.

 

 Il n’est nullement question d’un mouvement anticlérical

et  encore moins d’un rassemblement d’athées

 

Vingt ans plus tard

en 1737 le chevalier Ramsay prononce un discours

qui ne fait certes pas l’unanimité

mais qui suscite au sein du mouvement

un courant nettement spiritualiste et ésotérique

Ramsay  était un mystique né en Ecosse

 d’un père calviniste et d’une mère Anglicane,

Il fréquente en France  Madame Guyon

et sert de secrétaire à Fenelon

 

 

MESLIER un prêtre rebelle .Il pensait autrement mais il n’a pas osé le dire

21 septembre, 2008

 

Le titre du « mémoire  » de Meslier est à lui seul tout un programme

 

Mémoire

des pensées et des sentiments

de

Jean Meslier

prêtre ,curé d’Etrepigny et de Balaives

sur une partie des erreurs et des abus

de la conduite et du gouvernement des hommes

ou l’on voit

des démonstrations claires et évidentes

de la vanité et de la fausseté

de toutes les divinités

et de toutes les religions du monde

pour être adressé

 à ses paroissiens

après sa mort

et pour leur servir de témoignage de vérité

à eux et à tous leurs semblables

 

Scrupuleusement, méthodiquement, en citant des auteurs, Jean Meslier aligne ses preuves et pose des questions. .On sent dans sa démarche un être blessé ,car il a cherché Dieu avec sincérité et il n’a rien trouvé

 

Pourquoi donc  Dieu reste t il  caché? .Pourquoi ne se manifeste t il pas ,d’une façon plus claire,  plus évidente  ?

« Les dieux n’ont jamais agi et n’ont jamais parlé que par les hommes encore n’étais ce qu’en secret et en cachette ,et le plus souvent même ce n’était que la nuit par imagination et en songe . »[i].

 

 Le silence de Dieu ,est à l’origine de toutes les guerres de religions et des disputes entre les théologiens .Pourquoi Dieu ,s’il existe permet il cela ?.

Pourquoi ce silence de Dieu ?

 

Il n’est pas croyable qu’un Dieu de paix et d’amour  » aurait jamais voulu établir et mettre pour fondement de sa religion ,une source si fatale et si funeste de troubles et de divisions éternelles entre les hommes« [ii]

Cet argument du silence de Dieu était déjà avancé par Cyrano de Bergerac

 

Les Jansénistes et Pascal se souciaient fort peu de clarté et professaient une foi aveugle. Pire ,ils déclaraient « credo quia absurdum »

On trouve dans « Le catéchisme de Trente  » la phrase suivante:

 

 « Il faut croire ce que la foi enseigne , non seulement sans avoir le moindre doute, 

mais même sans désirer en connaître les raisons « 

 

Le concile du Vatican 1 en 1870 , distinguera entre la foi et le fidéisme et déclarera que tout acte de foi , doit être précédé par un raisonnement .On a pas le droit de croire n’importe quoi

 

Après ces réflexions générales sur la foi , le curé s’attaque aux Ecritures

Il constate que
la Bible est pleine de contradictions et d’invraisemblances

 

Si le massacre des innocents avait vraiment eu lieu ,comment se fait il que Saint  Mathieu soit le seul évangéliste à en parler ? et comment se fait il que Flavius Joseph ,qui connaît si bien, les faits et gestes d’Herode ,n’en fasse aucune allusion  ?  Matthieu et Jean ne parle pas de l’Ascension et pourtant un tel événement n’est pas banal et ils auraient dû en être particulièrement frappé.

Pourquoi l’église n’a telle acceptée que les quatre évangiles, alors qu’ils y en avaient tant d’autres ? .Quelles étaient les critères de son choix ?

Le Christ est venu enlever les péchés du Monde …mais le mal est toujours présent[iii]

 

Les sacrifices de l’Ancien Testament sont absurdes

Comment Dieu peut il se satisfaire de l’odeur du sang des sacrifices et de la circoncision .

Les prophètes étaient des exaltés au même titre que les « convulsionnaires » de Saint Medard.

Si Saul, Ezechiel ou Jérémie revenaient  dans nos rues ils seraient pris pour des  fous

Les prophéties ne se sont jamais réalisées.

 Jésus nous parle de son royaume qui est proche, mais ce royaume n’est toujours pas là .

Jésus dit « Demandez et vous recevrez «    et on a toujours rien

Jésus lui même se comporte parfois d’une façon indigne ,en insultant en particulier  un pharisien qui l’a invité à dîner[iv]  Que penser de sa  façon de chasser les vendeurs du temple ? Ses  raisonnements sont parfois étranges .Ainsi il dit  » il est écrit que le témoignage de deux personnes est reçu pour véritable, or je rends témoignage de moi même et mon père qui m’a envoyé rend témoignage de moi  [v]

 

Le curé s’attaque ensuite aux dogmes

A propos de
la Trinité, il ne comprend pas pourquoi le père et le fils sont égaux puisque le père engendre le fils et non l’inverse

Dieu est vraiment inconséquent car il se fâche pour vraiment pas grand chose , une petite faute d’Adam et Eue, et ensuite ,il décide  d’envoyer son fils pour nous pardonner

 

Il est vrai que l’exégèse moderne ne lit plus ces textes ,comme  Bossuet et les  hommes du dix septième siècle .Ces récits  sont des mythes écrits par des prêtres qui réfléchissent sur les gros problèmes de la vie.

Ils  ne doivent pas être pris à la lettre ,sinon on comprend l’incrédulité des personnes bien pensantes et raisonnables

 

Quant à la peine éternelle c’est une horreur inventée par des cerveaux fêles

 « Représentez vous l’effroyable malheur où seraient plusieurs de ces malheureux réprouvés, qui n’auraient peut être pour tout crime que celui être morts sans baptême d’autres  qui n’auraient peut être que celui d’avoir eu la faiblesse de goûter seulement quelques doux plaisirs naturels d’autres  qui n’auraient eu que celui d’avoir la volonté ou le désir de se venger de quelques méchants ennemis: d’autres 

 qui auraient eu pour tout crime que celui d’avoir manqué quelques messes …..«  

 

Au niveau de la  morale ,Meslier est étonnamment moderne .

 

Il ne voit pas l’utilité des sacrifices ,de l’ascétisme ,de la souffrance recherchée dans un but d’expiation. Il faut aimer la vie

L’amour charnel n’est pas un mal  Ce qui est à l’origine de la vie ne peut être que bon

Il est inadmissible de se laisser exploiter par les puissants et il faut lutter contre les injustices Pas question, de présenter « l’autre joue » La soumission  est une démission devant la vie

 Il faut l’égalité entre tous .Les nobles et les rois doivent disparaître

 

 Voltaire refuse de citer ces textes qui le dérangent

Dans la suite Meslier s’attaque aux philosophes et critique Descartes, Mallebranche. Ils s’en prend aussi à Fénelon

Fénelon démontre l’existence de Dieu en constatant qu’il faut nécessairement un être intelligent pour créer les merveilles du monde Meslier pense que cet argument ne fait que reculer le problème .Qui a créé Dieu, si intelligent?  Et Puis comment Dieu a t il pu créer de rien ?

 

Meslier s’étonne cependant devant notre naissance

« le plus grand philosophe du monde  serait bien incapable de se former une idée réaliste de son origine, s’il n’avait jamais vu ou entendu parler de la naissance des hommes ou des animaux .Comment devinerait il tout seul qu’il a été conçu dans le ventre d’une femme et qu’il en est sorti au bout de neuf mois » [vi].

 

La définition d’un Dieu immuable ,qui ne change pas, qui est impassible, est vraiment une idée saugrenue

 

Le curé critique ensuite Descartes qui ferme les yeux pour voir Dieu

Pour Descartes les animaux machines n’ont pas de sentiments et pas d’intelligence .Ce qui fait bien rire le curé des paysans Champegnois

Meslier s’etait libéré intérieurement mais il restait piégé par son environnement  .Les préjuges  de son entourage ,les circonstances de sa vie, des problèmes d’ordre pécuniaires ,l’ont obligé à rester dans le système .Il ne pouvait en sortir

 

Beaucoup de clercs par contre n’ont jamais été convaincus et sont entrés dans les ordres uniquement pour obtenir  un bénéfice .Ils n’ avaient aucun  état d’âme et vivaient très bien,  libéré de toute contrainte intérieure ,profitant au maximum du système

 

Erica Benabou dans un livre sur la prostitution au 18és donne des précisions sur la vie de certains membre du clergé libéré [vii].

Il raconte que les inspecteurs de police du célèbre Sartine  suivent pendant 10 ans des ecclésiastiques et prennent en flagrant délit 100 prêtres et religieux par an, pendant 11 ans  mais sans sanction sévère .Ils veulent seulement faire chanter les coupables et donner à Louis 15 des rapports croustillants que le roi lit avec ses maîtresses L’évêque de Paris Mgr de Beaumont anti janséniste et Boyer de Mirepoix chargé des bénéfices du clergé encouragent les recherches des inspecteurs. Ils auraient bien voulu surprendre des Jansénistes ….Parmi les coupables 0n signala un pauvre petit prêtre de  Notre Dame des victoires

L’évêque qui se trouve à Cambrai , là  même ou avait vécu le saint Fenelon, a une maîtresse .Quant au nonce de Paris ,il aime sortir avec  l’ambassadeur d’Espagne des maisons closes pour rejoindre des demoiselles aux petites vertus

 

Finalement le haut clergé ne fait qu’imiter les grands de la noblesse

Ils sont du même monde

Le prince de Conti, un Bourbon a 50 maîtresses répertoriées, mais ce nombre est à décupler .Le duc d’Orleans, futur égalité, a un comportement tellement crapuleux dans certaines maisons que les filles le fuient .Le duc de Richelieu et son fils le duc de Fronsac sont de chauds lapins     

D’Aligre, président au parlement organise  des soupers galants

Toujours selon les rapports de police ,Richelieu est « gamahuche » car il aime plutôt seringuer les filles. Seguier préfère se faire manualiser. Helvetius, philosophe ,proche de la reine, et ancien fermier général se fait  flageller

Pourquoi donc le haut clergé, agirait il autrement ,puisque il ne croit en rien ?

Dans ses mémoires Casanova raconte ses orgies à Venise avec le futur cardinal De Bernis  .Lui non plus n’a pas été piégé

 

Diderot dans son célèbre roman sur la « religieuse « raconte les souffrances des certaines soeurs qui ont été placées de force dans des couvents et  qui n’arrivaient pas à se libérer. Elles étaient souvent à jamais condamnées .Son héroïne oscille sans arrêt entre la soumission et la révolte , la dépression et l’indifférence .Finalement elle est dégagée de ses voeux qui selon Diderot sont  un défi à la nature

 

D’autres prêtres, religieux ,religieuses sont de saintes personnes ,sans histoires ,profondément convaincus dans leur foi et sont restés parfaitement épanouis dans leur état

 

Un Chrétien non religieux est toujours moins concerné par ses croyances ,car il s’est moins impliqué .Moins engagé, il est moins brisé

 


[i]    Montaigne   ,essai 501

[ii]    Meslier :Memoire tome1 p85

[iii]    Memoire tome 1 p 197 ss

[iv]    Mtt 2,13-26

[v]    Jn 8,13

[vi]    Meslier Memoire tome2 p187

[vii]    Erica Benabou :La prostitution et la police des moeurs     au 18é     p154 ss

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