Archive pour la catégorie 'Djadidisme'

Ahmad Yasavi. (1093-1166) : Le diwan i hikmat

7 avril, 2020

Ahmed Yasavi , né dans l’actuel kazakhstan, mort à  Yasi dans , l’actuelle Turkestan est un   un saint soufi qui a sa place dans le panthéon de tous les peuples de l’Asie centrale sans exception 

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Il écrit  en turc , la langue des nomades et des classes non éduquées  .. une belle langue, que les Turcs aimaient, et aiment toujours, lire, déclamer, et surtout chanter.

Il est le fondateur de l’ yasaviyya , lequel a joué un rôle très important dans la vie spirituelle de l’Asie centrale 

 

Le diwan i hikmat. 

les hikmât constituent un ensemble de textes religieux, fournissant un manuel de sagesse pratique fortement didactique

Sa poésie révèle un homme profondément respectueux des commandements de l’islam, mais de nombreux poèmes reflètent une doctrine imprégnée de croyances et de pratiques préislamiques, inspirée du chamanisme

 Ces contradictions peuvent s’expliquer par le fait,  que les hikmât ne sont pas l’œuvre d’un, mais de plusieurs, auteurs, tous disciples de Yasavi ou liés à son école

  les thèmes abordés par les hikmāt, on peut retenir : l’amour de Dieu, l’unité avec Dieu, l’amour du Prophète, l’attachement à la tradition (sunna) du Prophète, l’incitation à la pratique religieuse, les privations et l’ascèse, l’amour de l’humanité

 Sur le plan social, Ahmad Yasavī, à travers sa poésie, s’est insurgé contre l’injustice, se faisant le défenseurs des pauvres gens contre les oppresseurs de toute espèce ;

 

Critiques

cette doctrine fut fortement  critiquée par les républiques socialistes soviétiques du Turkménistan et d’Ouzbékistan 

mais.… Le folklore centrasiatique reste encore marqué par le souvenir d’Ahmad Yasavi. Faute de pouvoir recourir au texte des hikmât qui était interdit, les poésies du saint ont été transmises de mémoire, comme par le passé, et lues ou chantées dans des assemblées, une tradition maintenue jusqu’à aujourd’hui presque essentiellement par les femmes

Yasavi parlait trop du renoncement ,de l’anéantissement de soi … du fana des soufis  

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Sa réhabilitation

 En 1994 ,Les républiques turques obtinrent également de l’UNESCO que l’année 1994 soit déclarée « année Yasavi » au plan international.

 La Turquie s’associe très activement au processus de réappropriation identitaire d’Ahmad Yasavi en Asie centrale, pour au moins deux raisons :

la première est  politique  ..pour avoir des projets communs avec les nouvelles républiques turcophones de l’ex-URSS ;

la seconde est culturelle,

car Ahmad Yasavi appartient aussi au patrimoine religieux des Turcs de Turquie.

 Ainsi la Turquie participe, avec le Kazakhstan, au financement de la restauration du mausolée d’Ahmad Yasavi à Turkistan

Ahmad Yasavi joue un rôle de pont culturel

Il est   « la principale source de notre résurrection nationale et spirituelle » 

 L’objectif des États centrasiatiques semble être aussi de proposer un modèle de conduite religieuse modérée, loin des dérives fondamentalistes.

 

 Le mythe Yasavi devient le mythe de l’islam progressiste et les hikmët, un code de bonne conduite religieuse 

 mais une nouvelle exégèse de ces textes est nécessaire avant de présenter le poète comme un modèle de conduite pour les générations présentes et futures….Il faut  chercher le sens des hikmët, derrière leur « écorce poétique »

 Ce qui est essentiel aujourd’hui est de faire de Yasavi un homme de son temps, ouvert aux changements et à l’évolution que connaissent les nouvelles républiques.

 l’ensemble des exégètes modernes de sa pensée, à la suite du jadid ‘Abd al-Ra’ûf Fitrat, mettent aussi en avant son profond souci de la justice qui l’a conduit à prendre la protection des faibles contre les puissants.

 Respectueux également du pays dans lequel il est né, Ahmad Yasavī est présenté comme un patriote. En somme, il représente le modèle du citoyen parfait.

 Son islam n’est pas excessif et la plupart des centrasiatiques se reconnaissent en lui.

 Son islam n’est pas politique non plus, ce qui ne peut que satisfaire les républiques qui suivent avec inquiétude le développement de courants fondamentalistes sur leurs territoires (l’Ouzbékistan en particulier).

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 Le mausolée

Le pèlerinage au tombeau du saint à Turkistan, au Kazakhstan, est toujours très fréquenté

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Ahmad Yasavi : Le « tarki Duné » ou le renoncement au monde

6 avril, 2020

Les musulmans  marxistes venus de Russie reprochent à Yasavi Ahmed  d’encourager les gens à  renoncer au monde pour se consacrer totalement à Dieu :le Tarki Duné 

 « Si tu désires le Visage  de Dieu   rejette tout ce qu’il n’est pas, / anéantis ton existence avant de mourir » .

 Pour eux c’est  encourager la passivité, le pessimisme. …la perte de tout espoir dans la vie

la mort est , seule susceptible d’apporter une réelle satisfaction à l’homme. On se trouve là en plein mysticisme.

  Il est évident que les nouvelles républiques centre-asiatiques, ne pouvaient adopter comme héros national un penseur soutenant de telles idées. L’islam n’était plus un obstacle mais le mysticisme pouvait en être un.

Il fallait donc soit proscrire « le tarki dunë » soit l’interpréter. C’est la deuxième solution qui fut choisie

 Haqqul, dit « Il ne faut pas,  interpréter le mot fanā’, utilisé par Yasavi, dans le sens où l’entendent les mystiques, c’est-à-dire comme une annihilation ou un engloutissement dans la divinité

(l’expression fanā’ fi-llāh, « annihilation en Dieu »).

 le terme fanā’ signifiant que le poète rejette la fierté pour l’humilité et la modestie .

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Conclusion

Les références mystiques, « l’abandon du monde » (tarki dune) en particulier, étaient-elles de simples métaphores dissimulant d’autres réalités, sociales ou éthiques, comme le soutiennent quelques exégètes contemporains des écrits du saint ?

 Que penser alors des salles souterraines de réclusion appelées khalwat-khâna (chambre de retraite) que l’on trouve à proximité du tombeau d’Ahmad Yasavi et près des khānaqā (couvent) des cheikhs de la yasaviyya ? 

 Le fait de reconnaître une dimension mystique à l’œuvre d’Ahmad Yasavi ne remet pas en question les interprétations modernistes de sa pensée.

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La Naqshbandiyya et Ahmed Yasawi

Il existait par ailleurs en islam  à Boukara

à l’époque de Yasavi d’autres formes de mystique qui ne prônaient pas une rupture aussi tranchée avec le monde mais enseignaient plutôt, sans rien nier de la première attitude, comment réconcilier la voie du détachement avec celle du croyant engagé dans la vie de la cité

 C’est le cas de la confrérie Naqshbandiyya qui, nonobstant le fait qu’elle n’a jamais rejeté le renoncement (tark), imposait à ses membres de participer à la vie du monde. Cette conduite est résumée dans le concept bien connu de « retraite dans la société » 

Une formule  est attribuée à Bahā’ al-din Naqshband qui est proche du concept de « retraite dans la société » :

 « le cœur avec Dieu et la main au travail »

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Le djadidisme selon Thierry Zarcone

5 avril, 2020

Cahier du monde russe (vol XXXVII 1996 ) article de Thierry Zarcone

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On appelle ainsi les  théoriciens de « l’Ijtihad » (= le nouvelle méthode)

qui se sont surtout exprimés en Asie centrale  ou chez les tatars

a Boukhara ou Orenbourg  …

 

l’Ijtihad

« c’est la nouvelle  méthode ,  la nouvelle  lecture  des écritures qui  devait leur permettre d’élaborer  de nouvelles conduites sociales et religieuses face aux conditions du siècle sans se mettre en contradiction avec le commandement ( p 58)

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Ils sont très attachés au coran

Ce sont de vrais croyants ;  Ils ont la foi ! Ils y croient 

mais ils souffrent car les musulmans ne savent pas interpréter le coran

en tenant compte  de l’évolution du monde  et du progrès des sciences

Ils  sont à l’image ( du bétail) .. sourds muets aveugles ,il ne raisonne point (Q2,166)                

homme si tu es intelligent ne soit pas trompé par les hommes….interroge ta raison sur chaque vérité…car chaque intelligence  libre est un prophète qui tire les vérité de Dieu même sans intermédiaire aucun  ( p60)

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Laurent Vinatier écrit  dans son lire « l’islamisme en Asie centrale » (p101ss) 

« les djadids veulent prendre en considération les sources de connaissances modernes et occidentales  103

mais ne rejette en rien l’islam et adopte même un  discours fondamentaliste  au sens où ils prônent un retour à la pureté primitive de l’islam

 l’enjeu est d’ouvrir le monde musulman à la culture …Dans l’enseignement furent introduites des matières nouvelles laïques  telles que la géographie, l’histoire ou l’arithmétique .  5000 écoles djadids firent leur apparition en 1916 dans l’empire russe  (p104)

 Des écoles djadids s’ouvrent  à Tachkent ,Samarkand , Boukhara

..A Boukhara s’organisent  des véritables  sociétés secrètes « les jeunes boukhare » comme il y aura plus tard ,les jeunes turcs (p105)

…l’enjeu est moins politique que culturelle..

 On  remet au jour les idées de Ahmad Yasavi

les djadids  vont même profité de la révolution bolchevick pour mette leur projet en route

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le djadidisme  est bien à la fois symbole intellectuel de la modération de l’islam  et nouvelle étape dans la caractérisation de la pratique  religieuse centre-asiatique   ;L’islamisme dans ce contexte   qu’il soit modéré ou radicale ( comme les discours wahhabites )  trouve difficilement un écho favorable dans la population ; L’islamisme ,lorsqu’il a existé  en Asie centrale fut en fait utilisé au service d’autres  objectifs comme un ciment unificateur de l identité du groupe (p 112)

 

Mustafa Kemel et les kémalistes  reprendront cette idée  sans le dire 

Ils iront plus loin…en rejetant la religion  (p 109)

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Les djadids en Asie

4 avril, 2020

 

İbrahim ulı Qursawí  (1776–1812)

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Al Afghani (1838-97)

était  hautement apprécié dans les cercles réformistes tatars  car il est celui qui a le mieux expliqué la « nouvelle méthode

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Muhammed Abdu (1849-1905)

disciple de Al Agghani  est aussi très écouté

Tous les deux ont été qualifié de neo –mutazilite

tous les deux visaient à réveiller l’Islam ankylosé dans un conservatisme figé ,à le débarrasser  de l’imitation et à revenir aux sources authentiques du savoir religieux  c’est-à-dire au Coran ,à la sunna et à quelques hadiths sûrs ( p 57)

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Ismail Gasprinski (1851_1914) le journaliste

le journal de Gasprinski  Tercüman ( interprète ) était un organe majeur de l’opinion Jadid qui était largement lu dans toutes les régions musulmanes de l’Empire

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Musa Bigiev (1870-1949)  le Luther de l’Islam

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Les Jadids ont également utilisé la fiction …la poésie …le théâtre  

 

Abdurrauf Fitrat (1886 – 1938)  écrivain  

un auteur, journaliste et homme politique en  Asie centrale sous la domination russe et soviétique. 

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Al Qursavi (1776 -1812 ) et al Marcani (1818-1889)

3 avril, 2020

Selon M, ; Kemper  dans les  «  cahiers du monde russe »  vol XXXVII  1996   

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Al Qursavi

On le trouve d’abord à Boukhara en pleine polémique avec les savants du coin

« car il réfutait les traditions théologiques qui se sont développées après la mort du prophète  et qui selon lui avaient  pendant  des siècles  empêcher les musulmans de mettre en pratique les prescriptions du coran (p 43)

 Avec réalisme ,il aborde plusieurs questions de droit qui se posaient  aux musulmans russes

Fallait il  supprimer  la prière  de la nuit dans le grand nord où en été il  ne fait jamais une obscurité complète ?

Fallait il interdire la prière du vendredi dans les petites villes qui n’avaient pas un gouverneur musulman pour garantir que  le droit islamique était respecté ( p45)

 Son argumentation s’appuyait exclusivement sur le coran et la tradition du prophète en  ignorant délibérément la littérature juridique

 en 1810,il fut condamné pour hérésie

il décide alors de partir en pèlerinage à La Mecque  au cours  duquel il mourut à Istanbul en 1212

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Shihab al-Din al-Marjani ; (1818–1889) 

 était un Théologien  et historien musulman tatar

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Il a étudié dans les madrassas de Kazan dans l’empire russe

puis se rendit en en Transoxiane de 1838 à 1849

 A Boukhara  il a  prit connaissance de l’enseignement de Qursavi  

et  fut aussi admis  dans la, confrérie des Naqshbandiyya

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Il  assembla dans les bibliothèques de Boukhara et de Samarkand , les informations  qui lui serviront pour écrire son histoire des Khanats de Transoxiane

C’est grâce à lui que l’on connait Qursavi ,car il devient l’iman de la grande mosquée  de Kazan

mais comme Qursavi, il fut critiqué par les conservateurs de le confrérie Naqshbandiyya

 

les 2 auteurs furent perçus par le mouvement des  djadids à venir comme les fondateurs d’une pensée  religieuse tatar indépendante  en accord avec  les exigences du début du XXe siècle  ( p 49)

 

Ismail Gasprinski (1851-1914)

2 avril, 2020

Ismail Gasprinski ou Ismail Gaspirali  fut l’un des premiers Intellectuels musulmans de l’empire russe à proclamer la nécessité d’une réforme de l’éducation, de la culture et de la modernisation des communautés tuirques et musulmanes.le théoricien principal de l’unification du monde turcophone.

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Il est né  en Crimée.

En 1872 il part à Paris ce qui lui permet  d’analyser de près la civilisation occidentale.

 En tant que Tatar de Crimée, Ismail Gasprinski avait exprimé sa préoccupation sur l’absence d’une union entre les Turcs, en disant « Si nous continuons ainsi, l’avenir des Turcs de Russie sera sombre ».

 Gasprinski avait la conviction que les Turcs pourraient perpétuer leur présence en s’unissant autour d’une langue turque commune, craignant leur assimilation dans le tsarisme.

  Il a conçu un journal pour concrétiser ses idéaux. Ce journal qui s’adressait à l’ensemble du monde turcophone a été publié dans un langage simple, en turc.

Lancé sous le slogan « Unité dans la langue, l’idée et le travail »,

  Ce journal était lu dans les quatre coins du monde turcophone, notamment à Istanbul, par les intellectuels

en Azerbaïdjan et en Crimée.

 L’une des activités a été la création d’une langue turque commune. ..pour l’ensemble des Turcs.

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Fitrat (1886-1938) : Le dadjid de Boukhara

1 avril, 2020

Fitrat est né à Boukhara .  il séjourne à Istanbul pendant quatre ans, à partir de 1909.  C’est l’époque de la montée en puissance  des « jeunes turcs » et d’une floraison sans précédent  des lettres et des sciences ottomanes

 En 1913 de retour à Boukhara , Fitrat lance donc le mouvement des « jeunes boukhares » et participe aux premiers pas du théâtre turkestan ,jouant  lui même dans les pièces « le parricide » ou « est il facile d’être avocat ?  

 En 1915 ,il écrit sur la dure vie des femmes au Turkestan

et fait paraître un journal

 en 1917 il fuit  à Tachkent pour raison politique et crée  un  groupe de littérature multiethnique 

Il écrit un drame « sang sacré »…. prie pour la résurrection de Tamerlan  et la reconstruction de l’ empite timouide

 Le 2 septembre 1920 ,,Boukhara qui était sous le régime du protectorat russe depuis 1866  perd son indépendance avec la prise de la ville par l’ Armée rouge .

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Fitrat devient   membre du Parti communiste de Boukhara

puis  ministre des Affaires étrangères (1922), ministre de l’Éducation (1923), vice-président du le conseil pour le travail de la nouvelle République  populaire de Boukhara

 En 1921, Fitrat ordonne que la langue d’enseignement soit changée du persan au turki, qui devint également la langue officielle de Boukhara.

 En 1924 Fitrat est démis de ses fonctions  et part enseigere  à Tachkent et Samarkand

Sa dernière pièce,  »la vague », 1936), était une protestation contre la pratique de la cesnure

En 1937 Fitrat a été arrêté lors de la Grande Purge

et fut exécuté au début d’octobre 1938  à Tachkent

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Ces activités jadidistes était le « devoir de chaque musulman ».

Les deux tiers des œuvres de Fitrat traitent du sujet de la «culture»

 , Fitrat a commencé ses écrits avec des poèmes et plus tard des textes en prose, des drames, des œuvres journalistiques, des comédies, des commentaires politiques, des études sur l’histoire de la littérature et la politique de l’éducation ainsi que des écrits polémiques et idéologiques. Fitrat a réédité plusieurs de ses travaux antérieurs sous une forme retravaillée ou traduite dans une autre langue. 

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